La journée avait été comme d'habitude, rien de nouveau. Comme tous les jours j'avais fait de mon mieux pour éviter et ignorer les gamineries et les mauvais commentaires des autres élèves. Tous les jours, c'était les mêmes histoires plutôt fatigantes. Cette fois si je n'avais pas envie de rentrer tout de suite à la maison comme d'habitude, j'avais envie d'échapper à la baby-sitter, je la voyais bien trop souvent... vu qu'elle était surveillante dans le lycée en plus... je voulais sortir. Découvrir la ville moi-même, aller acheter quelque chose pour Lucifer, ça me donnerait une excuse. Alors, juste après les cours au lieu de prendre le bus pour Mission Canyon, j'étais allés faire quelques courses, puis ensuite j'avais pris le bus pour le Westside. J'avais envie de voir a quoi cela avait l'air.

En me baladant dans ces rues sombres j'avais complètement oublié le temps. À l'heure qu'il était il y avait plus de bus. J'aperçus un jeune homme immobile qui m'attirait l'attention. En m'approchant je pus voir ce qui l'avait immobilisé, il était visiblement très effrayé et fixait un chien qui aboyait en sautant. Cette dernière semblait très agressive, mais il y avait un grillage qui le retenait... J'aurais pu ne pas me préoccuper du tout... cependant je ne suis pas de ce genre et le jeune homme semblait incapable d'aller plus loin à cause du chien qui pourtant ne pouvait l'atteindre... J'eus donc une idée pour détourner l'attention du chien. Comme je n'avais rien mange de la journée j'avais achetée un sandwich au jambon que je n'avais pas encore mangé, Tan-pis ce serait pour le chien.
- ATTRAPE ! Dis-je d'un ton direct et déterminé.
Je parlais bien entendue à l'animal et lançais le sandwich par-dessus le grillage aussi loin que possible. Si le chien avait faim, ça l'occuperait forcément. Je m'approchais ensuite plus près.
- Ne vous inquiètes pas, il ne peut rien vous faire. Dis-je ensuite à l'homme pour essayer de l'assurer.
Il avait l'air très différent des gens dites "normaux". Il avait une apparence qui pouvait faire peur à plus d'un jeune et moins jeunes et pourtant c'était lui qui avait peur. Mais cela ne voulait rien dire, il n'était peut-être pas aussi dangereux qu'il pouvait paraître... Pourtant, il valait mieux rester vigilant quand même. Le problème maintenant c'était que je ne pouvais pas rentrer chez moi sauf si j'y allais à pied, or j'en avais pas très envie, autant rentrer après l'école demain. Mais en plus de cela j'avais très faim...

Le chien avait enfin réagi comme prévu. Lorsque le jeune homme s'était tourné vers moi je le regardais. Je trouvais qu'il avait de beaux yeux, j'aimais cette couleur bleue. Il ne me faisait pas peur, après tout il ne m'avait rien fait alors... mais il ne semblait pas très habitue à être en contact avec les autres, ou en tout cas pas avec un jeune comme moi. Ce se dit, cela ne voulait rien dire. Je n'étais pas du genre à afficher une étiquette sans connaitre...

Lorsqu'il me parlait je lui souriais, enfin si c'était réussi bien sûr, je ne souriais plus depuis que l'événement qui a bouleversé ma vie, a par peut-être à Lucifer bien sûr. Mais bon.
- Perdue ? Oui, en quelque sorte, mais pas de la façon dont vous le sous-entendez. Je ne suis qu'une ombre ambulante qui passe. Pas besoin de se préoccuper de moi.
Après tout, que pouvais-je bien dire... Ou plutôt que voulais-je lui dire ? Lui raconter ma vie ? Non, je ne partageais pas ma vie avec personne et puis ça n'intéresserait certainement pas, je n'étais qu'une inconnue. Si j'avais dit ma vérité de la sorte c'était parce que je ne voulais pas donner plus d'informations, ni même avoir à me justifier. Pour moi c'était évident, je n'étais rien aux yeux de mon père, Peut-être que je me trompais... mais la vérité était qu'il ne s'était jamais préoccupé de moi, donc pourquoi je me tromperais ?
- C'est vrai, je ne suis pas à ma place nulle part, faudrait que je demande à la faucheuse pourquoi il ou elle m'a épargné alors.
À vrai dire je m'en foutais d'où je me trouvais, quelle importance ? Je me trouvais en face d'un inconnu. Et alors ? Pour l'instant je ne me préoccupais pas de grandes choses. Ce n'était pas parce que j'avais abandonné les idées suicidaires que cela voulait dire que j'avais forcément envie de vivre non plus en fait. Faut dire que j'avais plus d'avis à ce sujet pour le moment au final... Le monsieur pouvait bien croire ce qu'il voulait, me prendre pour une folle, n'importe quoi, je m'en foutais. Combien de gens m'avaient déjà pris pour folle ou pas bien dans la tête de toute façon ?
- Ce se dit, j'aimerais bien vous dessiner si vous me l'autorisez. Malheureusement il n'y a pas beaucoup de lumière ici…
Là aussi il pouvait bien penser ce qu'il voulait. Cette question pouvait peut-être lui sembler bizarre, mais son apparence m'inspirait. J'aimais son look, oui. Ça paraît peut-être bizarre mais j'étais comme ça. C'était des gens comme lui qui attirait mon attention et l'envie de dessiner des personnes réelles....

Je ne m'attendais pas à ce qu'il me comprend, non. Qui le ferait de toute façon ? Même l'être le plus intelligent ne comprendrait pas forcément. Ce se dit, c'était bien le but. Ce se dit, si un jour quelqu'un comprenait sans devoir avoir des explications quand je parlais ainsi, y avais de quoi tirer son chapeau. De toute façon sa réponse était quand même un peu à côté de la plaque, mais je lui en voulais pas pour ça. Ce qui était intéressant en revanche c'était qu'il ne la prenait pas pour une tare parce qu'elle avait parlé de la faucheuse.
- Vous savez vous êtes bien le premier à ne pas me regarder bizarrement quand je la mentionne... À croire que beaucoup de monde ne connaissent pas son existence. J'en suis bien consciente qu'elle n'y est pour rien, ce se dit si elle m'a épargné ça doit être parce que j'ai encore un rôle dans ce monde bien que j'ignore quoi... Au final la provocation n'a aucun effet. Quant au fait que je sois perdue c'est plutôt à cause du destin, ou alors ça vient de moi-même. Va savoir....
Oui, j'y croyais, tout comme je pensais que chacun avait son rôle dans ce monde ou ailleurs. Si pour certains la seconde vie c'était au paradis ou à l'enfer, pour d'autres c'était sur terre, mais en tan qu'un animal, quant aux Vikings c'était au Walhalla. Et alors ? Ce n'est pas une raison d'être trait de tare si ? Après tout, ici beaucoup dans ce pays croyait aux esprits hantant un lieu ou une maison non ?
En le voyant sourire, même si je ne savais pas pourquoi, je lui rends le sourire.
- Ne soit pas si dure avec vous-même. Vous avez un certain charme même si vous l'ignorez. Ceux qui diront les contraires n'ont pas le sens de l'imagination et de l'originalité. Mais on ne peut espérer rien de la part des normaux qui n'acceptent que les normaux. Pourtant, il y a beaucoup de façons de se différencier des autres.
Je lui souriais encore, non je ne le trouvais pas laide, il était différent, très différent et surtout original.
- Si je devais ne dessiner que des êtres normaux, à quoi servent l'imagination et l'originalité ? C'est bien des gens comme vous qui me donnez l'envie de faire des portraits des gens réelles. En effet j'y verrais beaucoup mieux. Je ne terminerais probablement pas ce soir même, mais je me souviendrais de votre apparence.
Et c'est ainsi que je me trouvais un lampadaire pour m'asseoir afin de commencer le dessin. Serte la lumière n'était pas forte, surtout dans ces rues, mais c'était mieux que rien. Je sortis mon bloc des feuilles puis déposait mon classeur à dessin par-dessus mon sac. Puis-je pris un crayon pour commencer le dessin, comme d'habitude la première chose que je faisais c'était les yeux. Et je prenais le temps nécessaire pour bien représenter son regard et bien faire les ombres. Ensuite, je continuerais avec le nez, la bouche, les oreilles... la tête quoi. Je dessinais la tête complète de façon légère pour reconnaître les traits principaux de son visage. Et je le travaillerais en profondeur le reste et les détails plus tard. Pour mieux réussir un dessin il fallait prendre du temps, d'ailleurs les yeux commençaient à faire son effet bien que ce n'était pas encore coloré.